Lachambre Avocat

Dossiers COVID : justification des RNSM?

Indignation

Dossiers COVID: Qu’est ce qui justifie les RNSM? La multiplication des RNSM sur les dossiers COVID trouverait-elle sa source dans le lobbying des assurances… … ou bien dans le désintérêt de notre Cour de cassation pour l’égal accès de tous à la justice en France ? Suite de l’article RNSM et dossiers COVID… En 2025, le dossier COVID VIRAGE AUTOMOBILE se solde par un RNSM. L’assuré se voit débouté, quand, en 2023, dans l’affaire LACME, l’assuré est indemnisé. Comment la contestation de l’assuré qui voulait partager le même sort que LACME pouvait-elle être manifestement vouée à l’échec? Quelle est la lisibilité de la jurisprudence de la Cour de cassation qui, un jour approuve une vérité, et, le lendemain, valide son contraire? Où est la logique? C’est la recherche de la cohérence dans le positionnement de notre Cour suprême qui est vouée à l’échec. Alors que les deux assurés avaient souscrit un contrat TOUT RISQUES SAUF les couvrant sur les pertes d’exploitation non-consécutives à des évènements expressément identifiés par ailleurs, alors que les assurés ne demandaient que la mise en oeuvre de cette garantie, le résultat des deux affaires est inconciliable. Serait- ce alors un savant rééquilibrage entre la lenteur de la justice française, le lobbying et une équité toute relative?  La technique éminemment critiquable du RNSM Contrat « tout risque sauf » – Article 7   Etayons nos propos avec les détails éloquents que la technique du RNSM aurait pu « malencontreusement » faire oublier. Le cœur du débat est de déterminer si le contrat « tous risques sauf » peut couvrir les pertes d’exploitation sans dommage matériel préalable eu égard à la définition de son objet en article 7. La rédaction est maladroite pour au moins deux raisons : Une périphrase vague, Une syntaxe incorrecte.   « L’ensemble et la généralité des biens » illustre le souci du rédacteur d’être le plus englobant possible. Mais à travers des termes aux contours juridiques incertains. Cela étant, ce rédacteur a pris soin de ne pas qualifier limitativement ces biens, ni matériels, ni garantis, ni assurés! Systématiquement, les avocats des assureurs ont la langue qui fourche en plaidoirie. Ils exigent une atteinte à l’ensemble et la généralité des biens « garantis »… Une atteinte aux biens garantis (en pratique les biens matériels énumérés en début de contrat), serait parfaitement contradictoire avec la garantie des « frais et pertes consécutifs ou non » qui vise les immatériels non consécutifs. On parle ici des pertes d’exploitation sans dommage matériel préalable. Elles correspondent à un pan de dommages plus rarement garantis par les assureurs mais garantis tout de même[1]. [1] Rapport de l’ACPR en juin 2020. Il s’agit des « près de 3 % des assurés couverts par les contrats analysés [par l’ACPR en juin 2020] qui peuvent prétendre à une indemnisation […] notamment […] lorsque le contrat garantit les pertes d’exploitation quelle qu’en soit la cause et ne comporte aucune exclusion du risque pandémique ». Cette périphrase est rattachée aux dommages, aux recours, aux responsabilités et aux frais et pertes consécutifs ou non. Bien heureux celui qui donnera un exemple de « recours » et de « responsabilité » « subis par l’ensemble et la généralité des biens ». Faire porter à des mots imprécis un sens trop strict, viderait le contrat de son objet pour au moins deux garanties : recours et responsabilité. De quoi limiter les ardeurs de ceux qui voudraient induire une prétendue condition d’atteinte préalable à un bien matériel. Indirectement cela reviendrait à exclure des immatériels non consécutifs expressément garantis juste avant. La contradiction serait d’autant plus grossière que le même article 7 ajoute « qu’en cas divergence entre les différents textes, il sera toujours fait application des dispositions les plus favorables à l’assuré », dans la logique des règles d’interprétation des conventions rappelées aux articles 1188 et s. du Code civil. Malheureusement, il est parfois plus simple de focaliser sur quelques mots plutôt que de lire la phrase dans son intégralité. La Cour de cassation avait pourtant évité l’écueil en 2023, avec un arrêt motivé: Réponse de la Cour… La Cour d’appel d’Angers avait d’ailleurs particulièrement argumenté son arrêt du 28/09/2021 : Certes, le même jour, la Cour de cassation rendait déjà un RNSM contre un 2e arrêt de la Cour d’appel d’Angers. Cette fois, la chambre commerciale avait donné tort à l’assuré mais pour une autre raison. Elle a d’abord accepté la mobilisation de la garantie. Cependant, elle retenait que les carences du client et du fournisseur étaient exclues. Affaire MARTINEAUD, Civ2 9/11/2023 n°22-12.328. A noter que cette affaire impliquait les assureurs AXA et ALLIANZ, si chers à l’Avocat Général. Ce dossier avait fait l’objet d’une préconisation de RNSM du même conseiller rapporteur qu’on retrouvera en 2025. Ce conseiller rapporteur à notre connaissance recommande systématiquement des RNSM sur les dossiers COVID : 25/01/2024 n°22-14.739 concernant AXA heureusement non suivi. 4/04/2024 n°22-18.228 concernant MMA non suivi, 30/05/2024 n°22-16.930 concernant AXA  suivi. La portée du RNSM du 9/11/2023 dans l’affaire MARTINEAU semblait d’autant plus limitée que le 23/04/2023, la Cour de cassation (écartant la préconisation de RNSM, toujours du même conseiller rapporteur) cassait l’arrêt de la Cour d’appel de Bourges du 28/04/2022 alors favorable à l’assureur. Le motif ? Tout débat sur la carence de clientèle était hors sujet dès lors que l’assuré demandait la mobilisation de la garantie sur le fondement de l’article 4 E. Le fameux article « fourre-tout » doté d’un plafond réduit en contrepartie d’une garantie large. REF. n°22-18.228 affaire CATOIRE SEMI Dans la foulée, tirant leçon de cet arrêt de la Cour de cassation, la Cour d’appel de Bourges revoyait sa copie et acceptait de mobiliser les garanties de l’article 4 E au profit de la société EUROFORMULA (RG 23/00882 2/05/2024). Mais en parallèle, la chambre commerciale de la Cour d’appel d’Angers récidivait contre les assurés dans une affaire PLEIN AIR SACRESTE (RG 21/01749 7/05/2024) confortée par son RNSM dans l’affaire MARTINEAU, et indifférente à la validation expresse par la Cour de cassation du raisonnement favorable aux assurés de la chambre civile concurrente de la même cour dans l’affaire LACME.  

RNSM et dossiers COVID

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RNSM et dossiers COVID Quand la multiplication des RNSM, anéantit la confiance en la justice​ Dans un éditorial intitulé « Cour de cassation et assurance : le succès grandissant du RNSM/NA », le Professeur KULLMANN relevait que « devant la deuxième chambre civile » de la Cour de cassation traitant « plus particulièrement les recours qui concernent l’assurance », « la proportion des RNSM tend à augmenter constamment … ce qui explique et confirme l’appauvrissement des tables jurisprudentielles ». Le RNSM, c’est le rejet non spécialement motivé. En réalité, un rejet non motivé. L’affaire est ainsi « balayée par une formule plus que sibylline ». Si M. le Pr. KULLMANN « comprend le souhait de la Cour de cassation de ne pas perdre de temps à s’occuper de pourvois indéniablement stériles »… les choses ne sont pas toujours aussi simples. Il est à craindre la multiplication de solutions « un peu rapide[s] », moins coûteuses, mais hors de contrôle. Ces solutions semblent incompatibles avec les exigences d’un procès équitable, sans déni de justice, et respectueuses de la sécurité juridique. Revirement par le silence de la Cour de cassation dans l’assurance « tous risques sauf » des pertes d’exploitation COVID La Cour de cassation, 2e chambre civile, vient d’en donner une illustration par l’absurde.  Dans le cadre des dossiers PE COVID, pour un contrat TOUS RISQUES SAUF. (VIRAGE AUTOMOBILE – 23/01/2025 23-18.071). A première vue, un arrêt de rejet et donc, faudrait-il penser, un « pourvoi indéniablement stérile » ? Pourtant, ce RNSM début 2025 aboutit à un résultat diamétralement opposé à celui obtenu fin 2023 dans une affaire semblable en tous points. Or, l’affaire VIRAGE AUTOMOBILE est la copie de l’affaire LACME.  Arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de cassation. 9/11/2023 n°21-23.268. Les deux assurés ont subi d’importantes pertes à cause de l’impact de la crise sanitaire sur leur exploitation. Ces pertes ont porté atteinte à leur organisation interne, à la masse salariale, aux performances, aux états financiers, à la trésorerie, à la réputation auprès des organismes financiers et à tous ces actifs immatériels indispensables au maintien de la marge brute et de l’activité garanties. Les deux assurés avaient souscrit par l’intermédiaire d’un courtier un contrat TOUS RISQUES SAUF. Ces contrats ont la particularité de couvrir tout ce qui n’est pas expressément exclu. Ce que traduit la définition de l’objet de la garantie par une formulation particulièrement extensive : « le présent contrat garantit les dommages, les recours, les responsabilités, les frais et pertes consécutifs ou non, subis par l’ensemble et la généralité des biens ayant pour origine un évènement non exclu ». Ainsi les deux assurés disposaient d’une garantie que l’on peut qualifier de « fourre-tout ». Elles garantissaient les pertes d’exploitation non-consécutives à des évènements expressément identifiés par ailleurs, plafonnée à un montant radicalement inférieur à celui prévu pour les autres garanties, mais néanmoins non négligeable. (Article 4 E du contrat) RNSM de l’affaire de 2025 Les assurés sollicitaient la mise en œuvre de cette garantie, limitée dans son montant mais en contrepartie illimitée dans son périmètre, en accord avec la catégorie d’assurance « tous sauf ».   En 2025, l’assuré se voit débouté, alors qu’en 2023, l’assuré était indemnisé.   Plus exactement, en 2025, la Cour de cassation ferme les yeux sur l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles qui a rejeté toutes les demandes de l’assuré. En 2023, la Cour de cassation a expressément approuvé la Cour d’appel d’Angers pour les mêmes demandes. De deux choses l’une : Soit la Cour de cassation opère désormais des revirements de jurisprudence par le silence, Soit la Cour de cassation approuve qu’une vérité en-deçà des Pyrénées soit une erreur au-delà. Ou plutôt qu’une vérité devant la chambre civile de la Cour d’appel d’Angers soit une erreur devant la Cour d’appel de Versailles.   Dans un cas comme dans l’autre, la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français ne remplit pas son rôle.   Attendre 5 ans après la crise sanitaire pour un « circulez, y a (finalement) rien à voir » … gageons qu’à cette sauce, la France ne fait plus rêver. Et c’est de la justice d’Outre-Manche après laquelle on soupire… Là-bas, la Cour Suprême du Royaume Uni tranchait le 15/01/2021, « selon un cheminement atypique – accéléré » dans le cadre d’une « procédure test » « précisément censée offrir un cadre juridique clair pour éviter la démultiplication des procès sur la même problématique juridique »[1]  L’affaire a été rapidement tranchée en faveur des assurés. Cette procédure exceptionnelle a posé un cadre unique, un calendrier pragmatique, et des forces en présence équilibrées. La Financial Conduct Authority, l’autorité des marchés financiers anglaise a fédéré plusieurs assurés et porté pour eux le contentieux à l’encontre des principaux assureurs anglais réticents à indemniser les pertes d’exploitation non consécutives à des dommages matériels. [1] Covid-19 et pertes d’exploitation : la Cour suprême du Royaume-Uni se prononce en faveur des assurés, Evgeny Golosov, Lamyline En comparaison, que fait aujourd’hui notre Cour de cassation ? Sans vergogne, RNSM, elle botte en touche. Après avoir attendu dans l’indifférence que chaque assuré remonte jusqu’à elle un chemin parsemé d’embuches, elle décide de ne pas permettre une unification du droit en France. Pis, elle choisit de ne pas veiller à l’égal accès de tous à la justice. Ainsi, la Cour de cassation préfère laisser les assurés, leurs avocats et les juges du fond dans l’incompréhension. Peut-être la démarche est-elle plus proactive qu’elle n’y paraît? La Cour de cassation, en 2025, s’est-elle décidée à suivre discrètement mais scrupuleusement les recommandations de son Avocat Général? Avocat, qui, en 2023, in extremis, la veille de l’audience opposant les MMA à LACME, s’était littéralement ému du poids des pertes d’exploitation covid pour AXA et ALLIANZ. N A 21-23.268 o Décision attaquée : 28 septembre 2021 de la cour d’appel d’Angers Serait-ce l’avenir de la justice française ? La lenteur, le lobbying puis une équité toute relative? Les PME elles, ne  parviennent que très péniblement à atteindre ces sphères suprêmes! Si elles n’ont pas jeté l’éponge avant ? La suite jeudi 14 février…